Que l’on face acte de présentéisme contemplatif autrement dit d’absentéisme moral ou de présentéisme stratégique, « je reste super tard pour faire bien ». Le présentéisme par opposition à l’absentéisme, veut simplement dire que vous êtes présent plus que de raison.

De connotation plutôt péjorative, la notion de présentéisme est souvent perçue comme le fait d’être présent au travail, au-delà des heures normales surtout pour y être vu.

Loin d’être synonyme de démotivation, le présentéisme est en fait un surinvestissement dans le travail et s’attache à mettre en avant des comportements déviants de plus en plus répandus dans les entreprises d’ici et d’ailleurs.

Le présentéisme est un surinvestissement en termes de temps à son travail, mais ne signifie pas pour autant être plus productif.

  • Travailler alors qu’on devrait être en arrêt maladie.
  • Faire des heures supplémentaires sans être payé.
  • Travailler tard le soir et les week-ends
  • Ne pas prendre ces congés

Autant de symptômes révélateurs qui trouvent leurs origines dans des dysfonctionnements organisationnels, que les managers doivent apprendre à décrypter.

Dans certains pays, dont la France, les directions d’entreprises estiment encore que faire ces heures, des heures supplémentaires ou venir malade, est synonyme d’assiduité, d’esprit combatif, allant jusqu’à, pour certaines, l’ériger comme culture d’entreprise en donnant des primes de présentéisme afin de combattre un taux d’absentéisme jugé trop élevé…

Pour le collaborateur, c’est une possibilité de se faire une place dans l’estime de sa hiérarchie, dans l’optique d’une évolution de carrière plus rapide.

Ce phénomène est en forte progression depuis les années 2000. En 2006 en France, le présentéisme concernerait plus de 50 % des salariés.

Les causes et effets du présentéisme :

Les causes d’un taux élevé de présentéisme dans l’entreprise peuvent être issues de facteurs multiples, dues aux salariés ou à l’organisation du travail, réduisant d’autant l’inefficacité du collaborateur et l’obligeant à augmenter son temps de travail pour boucler ces objectifs :

  • Grande fatigue causée par une surcharge de travail systématique
  • Démotivation, désengagement, mécontentement, etc…,
  • Culture d’entreprise valorisant l’excès de présence
  • Des problématique médicales (physique ou mentale) non traitées
  • Des relations problématiques avec ses collègues et/ou son manager
  • Une recherche de reconnaissance
  • Ambiguïté des rôles et fonctions

Selon Hemp, 2004, Johns, 2005, le présentéisme dépasse en coûts l’absentéisme et les traitements médicaux.

Selon Aronsson & al., 2005, le sexe est sans effet et l’âge d’une influence ambigüe.

La situation financière difficile est décisive pour le présentéisme.

Les effets sont contrastés sur les conditions et l’organisation du travail :

  • Il y a moins de présentéisme si la qualité de vie au travail est bonne (Bockerman et al, 2010, Leineweber et al., 2011) :
  • Autonomie,
  • Bonnes relations avec les collègues,
  • Collectif de travail aidant,
  • Il y a plus de présentéisme lorsque qualité de vie au travail est difficile (Caverley et al., 2007, Claes, 2011) :
  • Charge de travail élevée,
  • Horaires décalés,
  • Manque de temps, de moyens,

Selon Algava, 2015, Biron, 2006, Hansen & Andersen, 2008 L’insécurité de l’emploi, les contrats précaires le risque de la perte d’emploi, favorisent le présentéisme.

Selon Bergström & al., 2009, le présentéisme se traduit par des conséquences à moyen et long terme sur l’état de santé des travailleurs et leur capacité de maintien en emploi.

En 2014, l’Anact publie « Présentéisme : une autre face de l’épuisement professionnel »

Connu au japon sous le terme « karoshi » de mort par surtravail, les japonais ne sont pas les seuls.

Thierry Rousseau, chargé de mission du département Changements technologiques et organisationnels de l’Anact, auteur d’un ouvrage sur l’absentéisme, évoque que « le présentéisme favoriserait l’apparition de pathologies qui affectent sensiblement les salariés : aggravation des maladies, retard dans les processus de soins, voire décompensation brutale et burn-out »

En 2016, la Dares en publiant « Présentéisme au travail : Mesures et déterminants », nous donne quelques informations sur ce phénomène émergent mais pourtant peu étudié, notamment en France.

  • 36% des salariés déclarent au moins 2,4 jours en moyenne par an.
  • Plus la santé reportée est mauvaise, plus élevé est le nombre de jours de présentéisme.
  • Plus l’autonomie est grande, mais également plus le salarié a de responsabilités de supervision, plus il fait de présentéisme.
  • La charge de travail a un effet ambigu : le nombre d’heures de travail hebdomadaires élève le nombre de jours de présentéisme, mais pas d’effet du manque de temps pour réaliser le travail, des horaires inhabituels, et du fait d’occuper deux emplois.
  • Pas d’effet de l’insécurité de l’emploi sur le présentéisme.

Les conséquences :

L’accroissement des exigences du travail et le renforcement de la concurrence pour des postes qui se raréfient, conduisent parfois à des comportements néfastes.

Le présentéisme renvoi au burn-out, épuisement professionnel du à une surcharge de travail et au bore-out, épuisement professionnel par l’ennui, tous deux aux conséquences pouvant être fatales.

Il peut provoquer une diminution de la qualité du travail et des décisions, augmenter le temps de guérison du malade, ainsi qu’accroitre le nombre d’accidents.

Le présentéisme peut donner lieu à des situations étonnantes de la part des collaborateurs comme :

  • La sortie en nombre de tous les salariés, dès que le directeur est parti.
  • A des techniques de duperies pour faire croire à sa présence, comme celle de la veste laissée sur le dossier de la chaise,
  • Programmer des envois de mails à 19h ou 20h,
  • Prévenir d’une réunion imminente et longue nécessitant de s’isoler afin de partir en toute discrétion…

 Que faire pour prévenir ou guérir de situations de présentéisme ?

  • Former les managers à détecter les personnes souffrant de présentéisme en analysant :
  • Certaines données révélatrices d’une charge importante de travail comme :
  • Les heures supplémentaires récurrentes,
  • L’explosion des comptes épargne-temps,
  • Le report systématique de la prise de congés,
  • Les mails, texto tard le soir ou le weekend…
  • La perte de lien sociale avec l’entreprise :
  • L’isolement
  • Absence des lieux de convivialités
  • Revoir les critères d’attribution des primes liées à la performance
  • Mettre en place des horaires d’ouverture et de fermeture des bureaux
  • Instaurer le droit à la déconnexion et une charte de bonne conduite
  • Ne pas programmer de réunion après 17h et en réguler le temps
  • Instaurer ces consignes lors de l’entretien annuel…

La notion de présentéisme doit faire partie prenante des objectifs que l’entreprise souhaite se donner dans une optique d’optimisation du temps et de qualité de vie au travail et l’entretien annuel est un moment favorable pour en rappeler les termes.

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